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Docteur Jean-Georges Rozoy


Résumé des abréviations utilisées dans les articles : consulter la liste.

1998

Dr J.-G. Rozoy

STRATÉGIES DE CHASSE ET TERRITOIRES TRIBAUX

AU MÉSOLITHIQUE



RÉSUMÉ

Les Mésolithiques ont vécu organisés très simplement à deux niveaux principaux : la bande et la tribu dialectale. Les sites élémentaires témoignent d'un ou plusieurs camps successifs d'une bande, les "grands" sites sont des accumulations de sites petits et (ou) moyens. Les cultures régionales nous ont été laissées par les bandes appartenant à une même tribu. Les stratégies de chasse peuvent être soit l'exploitation logistique du terrain avec des camps résidentiels et des camps et postes spécialisés, soit la mobilité résidentielle. La délimitation des cultures se fonde sur le groupement régional des caractères, qui exige une identification exhaustive des outils et déchets et des structures des sites en qualités et en quantités, notamment en tenant compte des styles de débitage et des styles de confection des outils. L'identification de camps saisonniers, en particulier de camps d'été en montagne, a parfois été donnée pour une exploitation logistique, les camps résidentiels étant dans les vallées ou la plaine. Mais la présence d'outils du fonds commun dans beaucoup de camps d'altitude prouve l'existence de camps résidentiels en montagne. Le diagnostic de la stratégie de chasse ne peut se fonder que sur un examen approfondi de toute la région. On ne peut confondre les notions de camps d'été en montagne d'une part, et de système logistique de l'autre.

ABSTRACT

The Mesolithics' way of life was organised very simply on two main levels : the band and the dialectal tribe. The elementary sites show one or several successive camps of one band, the "large" sites are an accumulation of small and/or medium sites. The regional cultures which we can perceive now were left by bands belonging to one single tribe. The hunting strategies may have been either the logistic land use with residential camps and specialised camps and pauses or residential mobility. The limits of the cultures are based on the regional grouping of features, which implies an exhaustive identification of the tools and wastes and of the structures of the sites both qualitatively and quantitatively, and more especially taking the debitage styles and the tool manufacturing styles into account. The identification of seasonal camps, more particularly mountain summer camps, was sometimes presented for logistic use, the residential camps laying in valleys or plains. But the presence of common tools in many high mountain camps shows that there were residential camps on mountains. The diagnosis of hunting strategy can be based only on a thorough investigation of the whole area. There should be no mistake about the notion of mountain summer camp on the one hand, and the notion of logistic system on the other hand.



La nécessité de cet article est apparue à l'auteur à la suite des discussions très conviviales développées à Valenciennes les 18 et 19 octobre 1997 lors de la Table ronde sur le Paléolithique et le Mésolithique organisée (à l'initiative du Pr A. Thévenin) par Gérard Fosse et surtout à Lausanne du 20 au 23 novembre 1997 lors de la Table ronde internationale sur l'Epipaléolithique-Mésolithique réunie (aussi à l'initiative du Pr A. Thévenin) par Pierre Crotti, Gervaise Pignat et Anne Bridault. Il convient donc de rendre hommage à ces organisateurs qui ont su assembler si sympathiquement une bonne partie des plus dynamiques chercheurs ouest-européens dans la spécialité. Les idées avancées dans ces réunions et ci-après vont entraîner de nouveaux échanges (oraux et écrits) permettant à tous, et en premier lieu au présent auteur, d'affiner, préciser, corriger et développer nos conceptions sur le mode de vie des archers mésolithiques (Rozoy 1993 b).

Bandes et tribus

A. Les deux niveaux structurels.

Comme tous les peuples (anciens et / ou subactuels) dont le statut social n'a pas développé une structure complexe inégalitaire, les Mésolithiques ont vécu organisés très simplement à deux niveaux principaux : le groupe élémentaire ("bande" dans la terminologie ethnographique classique) et le groupe régional, considéré généralement comme une "tribu dialectale" (Newell et Constandse-Westermann 1986, Constandse-Westermann et Newell 1989, 1997). Plusieurs tribus dialectales forment une "famille de langages", mais chez les chasseurs le niveau d'organisation est pratiquement toujours celui de la bande familiale, la famille "assumant tous les rôles " (Service 1968). La tribu est chez eux clairement perçue puisqu'elle est l'espace du même dialecte, où généralement on trouve à prendre conjoint, mais sans qu'il y existe une autorité centralisée. La famille de langages est évidemment, dans ces conditions, pour les archers mésolithiques, une entité plus vague.

B. Les sites élémentaires, simples ou complexes

Chaque site élémentaire que nous fouillons, par exemple Montbani-II (Parent 1972, Rozoy 1978, p. 461-477), Tigny-Est (Rozoy 1998 d et fig. 1) ou Roche-à-Fépin-Sud (Rozoy 1998 a), est constitué par les vestiges matériels subsistants après un camp d'une bande y ayant séjourné un temps x que nous sommes malheureusement incapables de préciser, mais qui s'exprime vraisemblablement en quelques jours (pour les plus petits sites), quelques semaines ou même quelques mois. Dans la plupart des cas, ce groupe élémentaire est revenu à une ou plusieurs reprises sur ce lieu qu'il connaissait et sans doute nommait, ces retours ont entraîné pour le site un matériel plus fourni nous permettant des études statistiques. On a ainsi présumé la présence à Montbani-II d'au moins deux unités d'habitation, dont on ne peut dire si elles étaient contemporaines ou successives ni si elles avaient servi une ou plusieurs fois; à Tigny et à Roche-à-Fépin les visites, probablement à la suite de circonstances météorologiques différentes, ont donné lieu à la formation d'ensembles voisins (Tigny-Ouest, fig. 1, Roche-à-Fépin-Nord); à Sablonnière-II (Parent 1973, Rozoy 1978, p. 465-477), sur une pente sableuse assez marquée, les passages ont été séparés par la venue d'un peu de sédiment, les foyers sont à des profondeurs légèrement différentes ne permettant toutefois pas une séparation exacte des matériels attribuables à chaque passage. Au Tillet (Rozoy 1996, 1998 c, e et fig. 2) on a pu distinguer à la fouille au moins neuf concentrations de silex, dont au moins deux remaniées par les Gaulois et les Gallo-Romains, les sept autres intactes, le tout provenant d'au moins dix camps de la bande (Tillet-2 a été utilisé au moins deux fois); les vestiges détruits par le carrier correspondaient, dans ce site où les rochers de grès constituaient des points d'appel, d'après la quantité des débris, probablement à plusieurs autres concentrations, plus encore trois concentrations repérées, sans avoir à postuler ce que des sondages plus étendus révéleraient très probablement. A l'Allée Tortue (Rozoy et Slachmuylder 1990) on connaît sur moins d'un hectare au moins onze concentrations de silex, la plupart probablement utilisées plusieurs fois. Au Closeau de Rueil-Malmaison (Lang 1997, Walczak 1997 b) il y avait aussi un nombre important de concentrations, dont au moins une est un atelier spécialisé dépendant d'un camp voisin. A Verrebroek (Crombé et Meganck 1996), ce sont au moins 8 petites concentrations de silex qui témoignent d'autant de camps ou d'ateliers. A l'Alpe Veglia (Guerreschi et coll. 1997), en altitude, trois aires d'activité distinctes. On pourrait sans peine multipler les exemples; plutôt que des "sites d'agrégation" dont l'existence même est discutée (Conkey 1992), il est de plus en plus manifeste que les "grands" sites sont des accumulations de sites petits et (au plus) moyens, le problème étant à chaque fois de déterminer s'ils ont été contemporains ou successifs, et dans ce cas à quel intervalle de temps.

C. Les cultures

A une autre échelle, les sites élémentaires peuvent être réunis (et donc distingués de leurs voisins) en ensembles plus vastes témoignant de l'existence de groupes régionaux personnalisés. Pour le présent auteur, chaque "culture" identifiée correspond aux vestiges matériels d'une tribu dialectale de 1 000 à 3 000 personnes (enfants compris) comprenant 65 à 200 bandes de ± 15 personnes ayant vécu sur un espace d'environ 120-140 km de diamètre (15 000 à 30 000 km2) (Rozoy 1978, 1997 c, 1998 b et fig. 3). Il y aurait donc une trentaine de cultures à identifier en France pour chaque période, non nécessairement les mêmes tout au long du Mésolithique, mais la persistance régionale paraît, après examen, être beaucoup plus la règle que l'exception (Rozoy 1978, 1994). Pour O. Kayser (1989) certains groupes côtiers seraient même identifiables sur des surfaces plus réduites. Pour d'autres chercheurs (Kozlowski 1975, 1980, Gob 1981, Ducrocq 1997 et fig. 4), seuls sont reconnus, sur des bases qualitatives fondées essentiellement sur les armatures et considérant comme négligeables les différences de style entre celles-ci, des ensembles beaucoup plus vastes réunissant huit ou dix cultures. On décrit alors en France deux ou trois "civilisations" (et en Europe quatre ou cinq) qui pourraient correspondre, si du moins leur délimitation était correcte, à autant de familles de langages : Tardenoisien (au sens large, Ducrocq 1997), Sauveterrien, etc. C'est, à peine aménagée, la vieille dichotomie de Clark (1936-1970) divisant l'Europe entre un Tardenoisien prétendu sans macrolithes et un Maglemosien à haches et tranchets. Que l'on retienne l'une ou l'autre analyse, il existe pour tous les chercheurs au moins un, sinon deux (ou plus), niveau(x) d'agglomération culturelle des groupes élémentaires (Newell et coll. 1990, Newell 1997 b). C'est en fonction de ces groupes élémentaires et au sein de ces structures sociales que doivent être envisagées les stratégies permettant à chaque bande de chasseurs de se procurer sa nourriture, besoin premier de tout groupe humain, avant même de se vêtir et de se loger.

Les stratégies de chasse

A. L'exploitation logistique

La chasse constitue dans nos régions l'essentiel de l'exploitation du territoire au Mésolithique, presque autant qu'au Paléolithique. Les végétaux, en effet, ne peuvent compter que de façon minime dans l'apport énergétique indispensable à la vie (2 500 calories par adulte), et pas plus le ramassage des escargots ou des fruits de mer (Rozoy 1978, p. 1034-1041, Rozoy 1993 b). La chasse doit ici être comprise au sens large, y compris la pêche, le piégeage et tous autres procédés d'obtention de nourritures animales, et aussi de matériaux (peaux) pour les vêtements, les tentes et de diverses matières (os, bois animaux, tendons) pour l'outillage. La stratégie de chasse est habituellement, pour le Paléolithique, envisagée d'après un modèle ethnographique subactuel comme une exploitation logistique : autour d'un camp de base rayonnent des expéditions d'approvisionnement confiées à des sous-groupes de la bande chargés soit de la chasse, ou peut-être du ramassage, soit éventuellement de rapporter d'autres substances indispensables, tel le silex ou parfois des matériaux de parure (coquilles, ambre, fluorine...). Les éléments rapportés seront, pour l'essentiel, transformés au camp de base, on n'effectue sur place que ce qui permet d'alléger la charge à transporter. Cela entraîne l'existence de camps spécialisés : postes d'observation, postes de chasse, postes de dépeçage, camps de chasse, camps d'extraction, etc. La composition de l'industrie relevée dans ces camps spécialisés, même si elle est abondante, est différente de celle du camp de base puisque l'on n'y pratique qu'une partie des activités. Celle du camp de base est plus diversifiée, toutefois une vue d'ensemble nécessite l'addition de tous ces éléments dispersés, et il est difficile de savoir dans quelles proportions les combiner. Il est incontestable que cette exploitation logistique a eu une réalité au moins à certaines périodes du Paléolithique supérieur, en particulier au Magdalénien supérieur. Elle paraît correspondre bien aux nécessités objectives de groupes élémentaires assez fournis, de l'ordre de 50 ou 60 personnes, la chasse au javelot ou au propulseur et à la sagaie demandant la participation de rabatteurs (Rozoy 1992). On ne déménage pas volontiers, en effet, un camp aussi nombreux, où d'ailleurs on a pu établir des installations semi-fixes commodes. On envisage généralement pour l'année deux ou trois camps de base pour la même bande, en fonction des saisons, des gibiers etc. Ce type d'utilisation est attesté pour de nombreuses populations de chasseurs subactuelles. Mais nous ne pouvons négliger l'avertissement donné par Binford (1968) lui-même : "haute probabilité que des formes culturelles aient existé dans le passé pour lesquelles nous n'avons pas d'exemple ethnographique".

B. La mobilité résidentielle

C'est un mode différent d'exploitation du territoire : si l'on chasse loin, au lieu de rapporter le produit au camp, on ramène le camp au lieu de chasse. En place de trois camps de base dans l'année avec l'exploitation logistique, on aura ainsi une douzaine (ou plus) de stations, dans chacune d'entre elles se dérouleront toutes les activités, aussi bien le traitement des peaux ou le montage des abris que la réparation des flèches et la taille du silex. Ce mode est plus à la portée de groupes peu nombreux avec un équipement léger et se nourrissant sur un gibier dispersé sur tout le terrain. Nous ne pouvons en aucun cas présumer l'un ou l'autre mode d'exploitation, nous devons toujours le déduire des observations.

C. Les trois stratégies d'exploitation

Quel que soit le mode constaté, il y a lieu en outre de distinguer trois types de stratégies concernant la ressource principale choisie : stratégie 1 : ressources stables et régulièrement réparties dans l'espace et le temps (mammifères forestiers), stratégie 2 : ressources concentrées dans l'espace et le temps, mobiles et non prévisibles (caribou), et stratégie 3 : ressources concentrées, mobiles et prévisibles (poissons migrateurs et/ou mammifères marins migrateurs) (Newell 1997 a). Pour le Mésolithique européen, la stratégie 1 est évidemment de loin la plus fréquente, mais sur les côtes et le long des fleuves la stratégie 3 doit intervenir de façon notable, au moins une partie du temps, entraînant des attitudes spécifiques de la part des chasseurs. Des ressources secondaires interviennent toujours en complément et compliquent le tableau.

Territoires tribaux

A. Le groupement régional des caractères .

L'identification des cultures qui témoignent des territoires tribaux (Rozoy 1980, 1990, 1997 b) repose sur le groupement régional des caractères typologiques et stylistiques. Ces caractères, qu'il y a intérêt à retenir aussi divers et aussi nombreux que possible, peuvent concerner des classes et des types d'outils ou / et de déchets, ou / et des techniques ou / et des structures, les uns et les autres analysés en quantités ou / et en qualités. Mais leur reconnaissance exige pour le Mésolithique un tri particulièrement soigné.

B. L'identification de tous les outils retouchés, sans exception

Elle est nécessaire à toute étude complète et surtout si l'on veut utiliser des statistiques. Elle présente pour le Mésolithique certaines particularités qu'il faut connaître si l'on veut éviter de laisser passer une bonne partie des objets. En effet, les archers d'une part fabriquent et manipulent des armatures microlithiques parfois hyperpygmées (moins de un centimètre dans la plus grande dimension, parfois retouchées sur les trois côtés), pour lesquelles ils débitent en quantité des lamelles fines (épaisseur moyenne 2 mm). La confection des flèches (diamètres de 5 à 10 mm, excellente rectitude, lots absolument homogènes), leur empennage et le montage des armatures sont aussi des opérations extrêmement minutieuses. Ils ont donc l'habitude de travailler très fin et font aussi quantité de travaux sur ces lamelles ou sur des éclats parfois très petits (2 cm), avec des retouches (ou traces d'utilisation) très marginales, tel le bordage (moins de un millimètre d'emprise). La grande fréquence des cassures de ces pièces confirme, s'il en était besoin, qu'il ne s'agit pas de déchets de la taille mais bien d'objets ayant été repris après leur débitage pour des fins qu'il reviendra aux tracéologues d'examiner, et qui de toutes façons sont caractéristiques des groupes régionaux (Dans le sable, les pseudo-retouches par piétinement ne sont pas en cause, or on y en trouve autant que dans des sites caillouteux). La perception de ces traces de travail, comme l'identification des débris d'armatures, des microburins (surtout les distaux, très petits), des lamelles cassées dans l'encoche etc, exige impérieusement un examen très soigneux de tous les objets, un à un, sous un excellent éclairage (soleil direct ou lampe électrique en éclairage rasant, donc au Laboratoire). Ce travail n'est accessible qu'aux personnes ayant (éventuellement après correction) une excellente vision binoculaire de près. Les mêmes conditions sont indispensables aussi pour l'identification des traces de percussion sur les armatures, traces souvent très faibles, notamment sur les segments, tant à la pointe que par contre-coup sur l'emmanchement.

C. Les éclats retouchés. Les conditions matérielles et psychologiques d"un tri exhaustif.

D'autre part (Walczak 1997 a), ces archers sont totalement maîtres du débitage, ils font dans des silex parfois médiocres absolument ce qu'ils veulent, débitant directement des lamelles sans préparation spéciale du nucleus, et ne s'astreignant pas à une séquence opératoire stéréotypée, ce qui permet la reprise du débitage à d'autres moments ou par d'autres personnes. Dans les outils, seule les intéresse la partie active, sans souci de mise en forme de la partie de préhension, que probablement ils savent emmancher. La plupart des groupes font donc peu de grattoirs, mais beaucoup d'éclats retouchés sans forme définie, parfois très petits (2 cm), les retouches étant souvent très localisées (moins d'un centimètre de long). Il est pratiquement impossible de distinguer retouches volontaires et traces d'utilisation (Rozoy 1978, p. 28-29). Mais pour l'identification comparative des groupes humains et l'analyse interne des sites cela n'a pas d'importance, ce sont toujours des objets caractéristiques dont certains font plus ou moins d'usage que d'autres. Que la lamelle cassée dans l'encoche soit un outil ou un déchet, c'est toujours un objet bien typé. Il importe en outre d'identifier chaque fois que c'est encore possible les armatures brisées : triangle dont on a le grand angle, pointe du Tardenois dont on trouve la base, segment de cercle possédant encore sa partie médiane... Il sera montré ailleurs (Rozoy 1998 e) que nous trouvons seulement les armatures provenant de la réparation des flèches après la chasse (ou après l'entraînement), c'est donc une forte majorité des armatures qui sont plus ou moins abîmées, et il importe de savoir les identifier. Le tri est une opération importante qui doit être effectuée au Laboratoire dans de bonnes conditions matérielles et psychologiques, avec une bonne lampe non éblouissante, de bonnes lunettes et une forte loupe, par un chercheur à très bonne vue possédant bien la typologie et prenant son temps. Une expérience récente a montré à l'auteur qu'un examen négligeant ou refusant ces principes peut rejeter jusqu'à 66 % des outils communs et 45 % des armatures (plus tous les débris), ce qui ramène tous les ensembles mésolithiques à des squelettes analogues. Il est alors impossible de comprendre les différences considérables des masses de silex (et des nombres de nucleus) utilisées par les groupes selon qu'ils font, ou non, beaucoup d'outils du fonds commun. Ceux-ci, en effet, sont liés aux nucleus et à une forte masse de silex, la confection de beaucoup d'armatures (manie des armatures chez les Tardenoisiens) ne nécessite que peu de nucleus, les poids de silex sont dix à cent fois moindres pour le même nombre d'armatures (Rozoy 1994). Certaines divergences de vues sur les groupes régionaux mésolithiques n'ont pas d'autre origine que cette difficulté (non perçue) du tri pour les chercheurs affligés d'une mauvaise vue.

D. Critères et correctifs des indices typologiques (en qualités comme en quantités).

Concernant les classes d'outils, un élément essentiel, mais loin d'être unique, est le taux d'armatures (fig. 5). Comme il doit être rapporté au total des outils, lequel comprend les éclats retouchés que certains chercheurs ne retiennent pas comme des outils, il est utile de le compléter par le rapport nucleus / armatures pointues. En effet, là où il y a beaucoup d'outils du fonds commun, il y a toujours beaucoup de nucleus, ce rapport permet donc de dépister la non-prise en compte de certains outils du fonds commun et d'en tenir compte. Le nombre important de nucleus est généralement en rapport avec un poids total élevé de silex (Rozoy 1994). Mais si l'opposition avec les cultures faisant beaucoup d'armatures est générale, les variations quantitatives des nucleus et des poids totaux au sein des cultures à bas taux d'armatures suggèrent l'intervention d'autres facteurs concernant les outils du fonds commun, qui mériteraient un examen approfondi. Le rapport numérique des lamelles retouchées aux lames retouchées, comme il a été démontré récemment (Walczak 1997 a, Rozoy 1997 a, Rozoy et Walczak 1998 a et b), est en fait un témoin des proportions de lames et lamelles fournies par le débitage. Malgré son aspect quantitatif, il témoigne aussi de qualités : de la technique du débitage et même du style des produits obtenus (style de Fépin, style de Coincy). Selon les régions et les cultures en cause, les éléments distinctifs varient, il faut faire preuve d'inventivité et ne pas hésiter à créer les moyens de distinction propres aux cultures en question.

Concernant les types, notamment ceux des armatures, les qualités prennent une grande importance. D'une part ce n'est pas la même chose de trouver un triangle scalène à petite troncature concave ou un scalène allongé à petit côté court parmi cent autres, ou d'en avoir autant, sinon plus, que des scalènes ordinaires. D'autre part, le style de réalisation des pointes à base transversale, par exemple, est nettement différent de l'Ardennien au Tardenoisien et plus encore au Beaugencien, surtout au stade récent (fig. 6). Sans parler de l'irrégularité foncière des armatures dans le stade récent du Mésolithique en Bretagne. On pourrait multiplier les exemples. En fait, ces perceptions de style, difficiles à expliquer et à mesurer, sont les premières qui interviennent : dès l'abord d'une collection dans une région que l'on ne connaissait pas on reçoit une impression de déjà vu, d'un domaine familier, ou au contraire d'étrangeté, de bizarrerie, et les familiers de la région en cause ressentent inversement les mêmes impressions lorsqu'ils découvrent celle dont on vient. C'est alors que l'on recherche des indices mesurables pour confirmer cette impression et produire des preuves quantifiées, plus convaincantes pour les collègues.

E. Le style et les modalités du débitage, indices fondamentaux.

Ce sont d'autres aspects de ces différences entre régions. Leur perception est tout d'abord essentiellement intuitive, comme celle d'un antiquaire distinguant un buffet Henri II d'un autre Louis-Philippe (mais il confirme ensuite par des éléments objectifs). Comme l'antiquaire, nous avons appris depuis une quinzaine d'années à analyser des critères matériels précis, et même quantifiés : Jérôme Walczak (1997 a) a pu ainsi démontrer le mécanisme (une plus grande précision dans la frappe à l'extrème bord du nucleus) entraînant la différence entre les styles de Coincy et de Fépin. La raison en est dans le choix des matériels de chasse, facteur culturel s'il en est (Rozoy 1997 a, Rozoy et Walczak 1998 a et b). La question des styles est essentielle , tant les styles de confection des outils que ceux du débitage. Elle doit jouer un rôle capital dans la définition de nos problématiques (Rozoy 1993 a). A ceux qui ne perçoivent pas les styles on ne peut que présenter des condoléances attristées et conseiller la reconversion vers les collections de timbres.

Camps d'hiver, camps d'été

A. Camps d'altitude et exploitation logistique : seulement une hypothèse.

C'est dans les régions de montagnes que le diagnostic d'occupation de certains sites en été présente le plus de vraisemblance, et que le plus d'efforts ont été faits pour le confirmer par des analyses objectives. Ainsi Ph. Curdy (1997) évoque-t-il pour Zermatt Alp Hermettji à 2 600 m "les liens de cette 'halte de chasse' saisonnière avec de possibles camps de base en basse altitude". Il a fort raisonnablement la prudence de commencer cette phrase par "également hypothétiques, les liens (...)". Mais on trouve fréquemment l'assimilation pure et simple des campements d'été en altitude à une exploitation logistique du terrain, "selon le modèle reconnu au Trentin" (Curdy 1997). Une telle assimilation est particulièrement tentante lorsque les sites d'altitude fournissent de hautes ou très hautes proportions d'armatures, jusqu'à 80 %, et même 90 % et plus, et les vallées des camps résidentiels à haut potentiel d'outils du fonds commun (Della Casa 1997). Le "groupe des Causses" (Rozoy 1978) a ainsi été considéré par d'aucuns comme un simple aspect de chasse d'été du Sauveterrien. Une telle hypothèse ne peut être ni considérée comme certaine, ni comme erronée, sans d'autres analyses qui jusqu'à présent paraissent faire défaut dans la plupart des cas : soit tels ou tels sites ne comportent pas (ou trop peu) d'ossements animaux conservés sur lesquels on puisse se baser pour établir la saison d'occupation, soit tout simplement les analyses n'ont pas encore été pratiquées, ou diverses causes se conjuguent (momentanément ou définitivement) pour nous laisser dans l'incertitude. Soit encore l'auteur n'a pas perçu la nécessité de telles recherches, la déduction lui paraissant évidente, et il a donc négligé les autres indices (lithiques ou autres) qui auraient pu le mettre sur la voie d'une analyse plus objective. Il est donc prudent de bien toujours souligner, lorsque l'on n'a pas de preuves patentes, que ladite assimilation des camps d'été à une exploitation logistique du terrain demeure une hypothèse pour laquelle il est nécessaire de rechercher des éléments de confirmation... ou, ne l'oublions pas, d'infirmation ! Sinon nous en ferions un postulat (ce n'est malheureusement pas le seul connu en Préhistoire, voir à ce sujet Rozoy 1997 d). Et la transformation (involontaire et inconsciente) en postulat entraîne automatiquement l'aveuglement total envers tout indice qui pourrait mettre en cause ce jugement préconçu, la négation de tout axe de recherche pouvant approfondir la question.

B. Indices pour retenir ou rejeter l'idée d'une exploitation logistique. Les outils du fonds commun.

Sur quels indices peut-on retenir ou rejeter l'idée d'une exploitation logistique ? Par définition, sur la coexistence dans une même zone (mais qu'est-ce qu'une même zone ?) de camps contemporains présentant des caractères différents. Les établissements résidentiels comportent dans leur outillage et leurs structures toute la gamme des activités pratiquées par les chasseurs en question, mais ils sont fortement liés à la stratégie de chasse pratiquée dans la position et à la saison en cause : si on se nourrit principalement sur le saumon (stratégie 3), les engins de chasse (de pêche), de dépeçage et éventuellement de mise en conservation (enfumage, séchage, salage...) ne seront pas les mêmes que dans un camp consacré (par les mêmes, mais à une autre saison) au cerf et au sanglier (stratégie 1) (la stratégie 2, concernant le caribou ou le renne, ne paraît pas en cause pour nous). Les postes d'observation et de chasse sont censés ne comporter que des instruments de chasse (de pêche), donc pour nous des armatures (toutes ou en majorité pointues). Mais ils peuvent se doubler (au même endroit ou non) de sites d'abattage ou / et de dépeçage, dont le matériel sera encore différent. "Tous sont hautement spécifiques de la ressource et donc spécifiques de la saison et du lot d'outils" (Newell 1997 a). Les camps temporaires d'approvisionnement (field camps ) et les camps de transit "montrent des affinités avec les camps résidentiels et doivent donc fournir des compromis similaires entre la proximité des ressources et le besoin d'éléments de confort matériel comme de l'eau, du combustible et un abri contre les éléments" (Newell 1997 a). Or, dans bon nombre de camps d'altitude, dont certains ont été prouvés d'été, les chercheurs signalent, parfois avec étonnement, la présence d'outils du fonds commun, en particulier des grattoirs, et même des éclats retouchés, pour ceux qui consentent à les considérer comme des outils. Ainsi Marco Peresani (1997), décrivant deux sites d'altitude au-dessus de 1 000 m, relève dans l'un d'entre eux (Palughetto) "a general equilibrium in the structural indices ". Mais l'autre (Casera Lissandri) "does not share the same features of the mesolithic mountain sites of the Southern Alps ". La question est de savoir si cette différence tient à la situation en montagne (qui est celle des deux groupes) ou plutôt à l'appartenance à un groupe régional voisin. Gervaise Pignat (1997) signale pour le Mollendruz, à 1 100 m, des armatures et des grattoirs, et ajoute : "ce comportement technique diffère peu de celui que l'on observe sur un campement de plaine comme celui de Vionnaz". A La Fru, qui n'est qu'à 570 m, mais dans la Chartreuse au climat rude, G. Pion (1997) signale, avec un taux d'armatures pointues inférieur à 50 %, l'abondance des éclats retouchés et d'autres outils du fonds commun. Enfin M. Mussi et coll. (1997) décrivent dans les Abruzzes, entre 1 200 et 2 000 m, avec en hiver 2,45 m de neige, des camps d'été dûment prouvés ("entre la fin de l'été et l'automne") consacrés, outre la chasse, à l'exploitation du silex qui manque en bas, dans la plaine, "les nucleus étant systématiquement emportés au moment du départ".

C. Les camps résidentiels en altitude.

La perception de l''existence de camps résidentiels en montagne découle de la présence dans les camps en altitude, avec une certaine abondance, d'outils domestiques qui sont un très fort indice de la pratique en ces lieux d'activités non rigoureusement liées à la chasse. Dans ces cas au moins on doit conclure à un caractère résidentiel, et non spécialisé, du camp en question. Il reste à savoir si l'on trouvera autour de ce "camp de base" d'été les postes de chasse etc témoignant d'une exploitation logistique. Mais nous pouvons déjà exclure que tous les camps d'été en montagne soient nécessairement des succursales logistiques de camps de base obligatoirement disposés dans la plaine. Ce mode d'exploitation serait d'ailleurs hautement incommode et gaspilleux de travail, à cause du temps et des efforts importants nécessaires pour rejoindre des sites aussi éloignés et avec une forte différence d'altitude. Mais la réalité de ces camps résidentiels en montagne ne prouve pas (ni n'infirme) le caractère logistique de l'exploitation de la montagne en été. Il s'agit simplement des classiques positions saisonnières qui peuvent exister aussi bien dans un système logistique qu'en cas de mobilité résidentielle. La distinction entre ces deux pratiques devra reposer sur d'autres analyses mettant en jeu des explorations systématiques du terrain (field survey ). On ne peut d'ailleurs exclure (ni affirmer sans preuves) la pratique d'un système logistique en montagne pour des gens utilisant la mobilité résidentielle en plaine ou dans les collines, ou inversement.

D. Les camps d'altitude à forts taux d'armatures.

Il reste le problème des forts taux d'armatures dans certains camps d'altitude. On connaît en plaine ou dans les collines des cultures à forts taux d'armatures, en premier lieu le Tardenoisien moyen, qui culmine à 65 % dans le site éponyme du Mésolithique, la Sablonnière de Coincy. Mais des chasseurs comme ceux des Causses vont beaucoup plus loin, au-dessus de 80 et même 90 %. Et ceci, aussi bien dans les marges basses du Causse : à Fontfaurès (Barbaza et coll. 1991), à 215 m d'altitude, 70 % d'armatures, sauf dans la couche la plus profonde qui est à 35 %, cela évoque donc une évolution dans les pratiques du groupe, parallèle à celle du Tardenoisien. Les premières synthèses en la matière (Rozoy 1978, chapitre 17) s'appuyaient certes sur un trop petit nombre de stations pour pouvoir être beaucoup plus que des hypothèses de travail, mais il semble bien que les recherches effectuées depuis vingt ans aient fourni plus de confirmations de ces taux d'armatures élevés, que d'infirmations. Une synthèse régionale serait la bienvenue, la publication très attendue de la thèse de N. Valdeyron (1994) et du colloque de Sauveterre (Rozoy 1995) nous la fourniront peut-être. Le groupement géographique de ces taux élevés ne laisse dès lors que deux hypothèses possibles : soit l'existence d'un groupe régional avec des pratiques techniques entraînant ce fort usage des armatures, soit la vacuité de la région en hiver, les chasseurs étant retournés à leurs bases et n'utilisant ces territoires qu'en été. Cette seconde hypothèse, qui a une certaine vraisemblance pour la haute montagne, ne peut guère être retenue pour le Quercy. Une véritable solution ne pourrait résulter, dans un cas comme dans l'autre, que d'examens très complets des terrains dans les régions en cause. Il demeure en tous cas indispensable de bien distinguer les notions de camps d'été en montagne d'une part, et de systèmes logistiques de l'autre, qui ne doivent pas être confondues.

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Légendes des illustrations

Fig. 1 - Tigny, densité des silex.

Malgré l'historique mouvementé de l'exploration du site, on distingue clairement la présence de deux concentrations de silex, témoignant d'au moins deux camps des archers. Le camp Est, plus compact, a probablement été utilisé une seule fois, comme le confirment d'autres plans (Rozoy 1998 d). Le camp Ouest, plus dispersé, doit avoir été visité plusieurs fois.

Fig. 2 - Le Tillet, densité des silex.

La séparation entre Tillet-2 et Tillet-3 est manifeste, les autres distinctions demandent l'examen des nombreux plans de répartition des catégories d'outils et de déchets (Rozoy 1998 e).

Fig. 3 - Sites du Tardenoisien, de l'Ardennien et de la Culture de la Somme.

Le groupement géographique des particularités quantitatives (taux d'armatures etc) et qualitatives (style de débitage, styles des armatures) conduit à reconnaître les limites des cultures. Il y a eu variation de la limite entre l'Ardennien et le Tardenoisien du stade ancien au stade moyen : Roc-La-Tour II et l'Ourlaine sont tardenoisiens, mais au stade moyen l'Ardennien qui vient de se constituer s'étend dans le bassin de la Meuse jusqu'à Marlemont. Par contre, la limite que l'on avait cru percevoir près d'Amiens au stade récent entre Tardenoisien et Culture de la Somme était illusoire, la rivière Oise demeure frontière jusqu'à la fin (Rozoy 1994) et il y a même peut-être au stade récent des sites de la Culture de la Somme à l'est de l'Oise (Mauregny). La frontière nord du Tardenoisien-Sud a dû être rectifiée depuis la découverte du Closeau à Rueil-Malmaison, ce site à faible taux d'armatures appartient à une autre culture qui reste à délimiter et à mieux identifier.

Fig. 4 - Les cultures mésolithiques en Europe occidentale, d'après Rozoy et Kozlowski.

Les divisions retenues par S.K.Kozlowski englobent chacune huit ou dix cultures de Rozoy, et même plus si l'on retient les groupes plus restreints spatialement reconnus par O. Kayser (1989). Mais, de toutes façons, il y a accord sur l'existence d'au moins deux niveaux d'appartenance, la bande et la culture. Pour le détail de cette carte, consulter Rozoy 1991 a.

Fig. 5 - Taux d'armatures dans l'Ardennien et le Tardenoisien.

On a ajouté au graphique publié en 1978 les deux principaux sites fouillés depuis et la stratigraphie de Birsmatten, où l'enflure des armatures au stade moyen est aussi bien moindre que dans le Tardenoisien. Autant la Roche-à-Fépin, au stade moyen, s'intègre parfaitement à l'ensemble ardennien, avec une augmentation modérée des armatures, comme à Birsmatten, autant la surprise provient de l'Ourlaine, qui en outre a peu de nucleus et a des segments, et est donc très proche du Tardenoisien, montrant que le stade ancien n'est pas, en Ardenne, aussi homogène qu'on aurait pu le penser. On ne peut guère affirmer une division régionale pour le stade ancien, puisque l'Ourlaine est à peu de distance des autres sites anciens sans segments, qui toutefois ne sont datés que par la typologie et pourraient être un peu postérieurs. Cette intrusion tardenoisienne reste, autant que l'on sache actuellement, limitée au stade ancien. Il y aurait donc naissance de l'Ardennien au stade moyen, par division du Tardenoisien qui occupait un territoire trop vaste (il y aura une autre division du Tardenoisien au stade récent, la partie au sud de la Seine prenant son autonomie). La fouille et l'analyse correcte de nouveaux sites sont nécessaires pour préciser les choses au sujet de l'Ardennien. L : Limbourgien. En marge gauche : l'Ahrensbourgien.

Fig. 6 - Styles des armatures.

1° ligne : Ardennien de Marlemont.
2° ligne : Tardenoisien de Montbani-13.
3° ligne : Beaugencien des Hauts de Lutz et de Lorges.

Le style des pointes du Tardenois dans l'Ardennien, avec les ogives surbaissées et l'épaisseur plus forte, est franchement différent de celui du Tardenoisien. Celui des triangles aussi (la pièce 2 a percuté en bout, preuve de son usage en pointe). Dans le Beaugencien récent (contemporain de Montbani-13) c'est encore un troisième style avec les retouches directes semi-abruptes et les bases biaises qui passent au triangle scalène. Cette transition n'existe ni dans le Tardenoisien ni dans l'Ardennien, et des scalènes à retouche inverse semi-abrupte non plus (ne pas confondre avec les flèches de Belloy, dont la retouche inverse est plate, Rozoy 1991 b). Il y a aussi des "pointes" arrondies (la pièce 2 de la ligne du bas), des pointes du Tardenois coupées par la méthode du microburin. Les différences de style, lorsqu'elles existent, sont un indice très fort de groupes sociaux distincts. Mais deux groupes peuvent avoir le même style, par exemple la Culture de la Somme et le Tardenoisien, et différer par le débitage ou par les proportions des outils, etc. Voir aussi à ce sujet la fig. 1 dans Rozoy 1991 b, qui présente quelques styles des trapèzes et armatures dérivées.


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